La jeune femme était partie de bonne heure ce matin: officiellement elle ne voulait pas rater l'arrivée de marchands et divers paysans pour avoir les meilleurs produits...Logique n'est-ce pas ? Ses parents l'avaient donc autorisé à partir à l'aube avec son fidèle compagnon. Officieusement elle avait besoin de respirer, mais aussi de s'acheter de nouvelles bottes et éventuellement un couteau de lancer. Il lui en manquait un. Les sabots claquèrent sur les pavés. Drapée dans une agréable cape fourrée, Myrsela confia son cheval à un homme dont s'était là l'occupation, puis se dirigea vers le marché. Elle y déambula un moment, achetant deux trois bricoles. Après avoir salué plusieurs connaissances de ses parents (son père surtout ne l'oublions pas), la jeune femme s'orienta plus avant dans la ville. Elle s'orienta sans difficulté, atteignant le magasin d'armes. Elle y entra d'un pas sûr. Levant les yeux, ses prunelles vertes croisèrent d'autres qu'elle ne connaissait que trop.
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William n'allait pas la retenir plus longtemps. La glace était brisée suivant leur instant de dérive. Peut-être serait-ce suffisant pour ôter le malaise qui planait entre eux. C'était sûrement loin d'être assez, mais c'était un premier pas vers le retour aux choses normales.
" Bonne journée Mademoiselle Owen. Je ne vous retiens pas plus longtemps. "
Dit-il avant de se tourner de nouveau vers les armes qui l'intéressaient pour son beau-frère.
Il n'était pas sûr de ce qui plairait à l'ainé Fergusson, mais on ne se trompait jamais en restant sur des valeurs sûre, telles qu'une épée décoré avec soin, presque une œuvre d'art à elle toute seule.
Si la jeune femme parlait au simple brigand, elle se serait renseigné sur le beau-frère en question afin de savoir ce qui pourrait correspondre. Mais elle se contenta d'un petit sourire: -Très bien. Je vous laisse à votre réflexion Monsieur. Elle inclina la tête, avec une révérence écourtée. Ses yeux croisèrent encore furtivement ceux du Mackinnion, et les non-dits furent un instant flagrant. Puis plus rien. Elle se détourna, et quitta d'un pas rapide la boutique. Une fuite honorable pourrait-on dire.
Le jeune homme écouta la demoiselle expliquer la raison de sa présence dans le magasin d'arme. Il opina de la tête avant de se tourner pour observer les diverses armes accrocher sur les murs ou poser sur les comptoirs. C'était une très belle armurerie, et il allait rarement ailleurs pour s'acheter des épées. Parfois il se permettait un achat démesuré, produit par les armureries d'Europe, mais c'était rare. La majorité du temps, il se contentait de ce magasin prestigieux.
" Je suis venu chercher un cadeau pour mon beau-frère qui fête bientôt une nouvelle année. Je ne suis pas encore fixé sur l'objet en question mais je suis certain de trouver son bonheur ici. "
Expliqua-t-il en s'avançant vers une étale pour examiner quelques épées finement décorées.
Elle inclina légèrement la tête pour le remercier de sa remarque obligeante. Toutefois elle demeurait aux aguets: le jeune noble avait l'esprit vif, et le lui prouvait. Elle refusait de se laisser piéger. Aussi à la question fort habile du sieur, la jeune femme eut une très rapide hésitation. -Je viens m'enquérir de dagues de chasse. Et aussi accessoirement veiller à quelques commandes diverses, messire. La réalité serait difficile à avouer, mais fort drôle. Si seulement. Elle osa un sourire un peu moins empreint de politesse, mais cela ne se vit guère pour qui n'était pas averti. -Et vous, si je puis me permettre?
Le jeune laird sourit d'un air entendu. C'était une perspective intéressante pour leurs familles. William n'avait pas voulu insister mais après tout, son père lui avait confié la mission de parfaire l'union entre la famille Owen et la famille Mackinnion. Ce n'était pas la première fois que le Laird lui confiait une mission sérieuse, cependant cette fois-ci cela pourrait se révéler plus compliqué à cause des personnes concernées.
William ne savait trop comment ça se passerait. D'autant plus que ce serait en compagnie de sa promise qu'il devrait s'occuper de cette tâche. Rien de simple en somme.
" C'est très gentil de votre part, à vrai dire je n'en attendais pas moins. "
Il marqua un arrêt avant de reprendre.
" Quelles tâches accomplissez vous pour M.Owen aujourd'hui ? "
Demanda-t-il en faisant référence à l'armurerie où ils se trouvaient.
Les femmes seules étaient rarement les bienvenues ici, raison pour laquelle William accentuait sur le fait qu'elle soit chargée d'une course par l'homme de la maison.
Le sourire du jeune homme témoignait que ce jeu,bien qu'il était loin d'être innocent, était apprécié. Myrsela plissa très légèrement les yeux, à la fois surprise du tour que prenait cette rencontre improbable et indésirée. -Votre future épouse sera évidemment reçue avec tous les égards, monsieur. Elle conservait son attitude distante et profondément servile, en bonne fille de commerçant, mais à un tel point qu'une personne avec un minimum de finesse savait que le rôle était volontairement surjoué. -Je serais plus qu'heureuse qu'un ''nouveau'' lien soit forgé entre notre maison et la vôtre... Toute ironie mise de côté, c'était une réelle opportunité pour l'élevage.
La conversation prit un tournant inattendu. Autour, les personnes présentent dans le magasin ne se doutaient de rien, même si leurs répliques devaient sonner légèrement étranges à leurs oreilles. Le jeune laird resta silencieux pendant que Myrsela répliquait avec talent. En toute circonstances, elle avait du répondant. Le jeune homme continuait de sourire même si ce n'était pas l'expression qu'il aurait souhaité afficher.
" Je serai ravi de visiter vos écuries, n'ayant malheureusement pas pu le faire lors de l'achat de votre étalon pour ma fiancée. Elle aussi, aimerait découvrir le travail et les soins que vous portez à vos chevaux. Ce serait l'occasion de régler la paperasse pour officialiser la famille Owen comme Écurie Officielle des Mackinnions. Le titre fera prospérer votre commerce, je suis sûr que vous le savez déjà. "
C'était une conversation et une négociation que les Mackinnions avaient en cours avec le père Owen. Ayant été plus que satisfait de leur travail, ils avaient décidé de leur donner ce titre d'excellence. Ne restait plus qu'à venir apposer le sceau familiale sur le document officiel.
Le sourire du jeune homme ne lui échappa pas. Dans d'autres lieux, et s'il n'avait pas ce statut, elle en serait franchement amusée mais en l'occurrence le rire était amer. William était en position de force et il le savait. Mais Myrsela avait de quoi répliquer. Étonnamment, elle sentait que ce n'était pas le but recherché. -J'en suis heureuse, nous essayons d'obtenir les meilleurs races et de les éduquer au mieux. Si vous désirez en savoir plus, notre maison vous est ouverte, bien entendu! Bien entendu. Elle avait légèrement appuyé dessus, pour montrer toute l'ironie tout en conservant une apparence parfaitement policée. -Nombre de nos chevaux sont des animaux remarquables, je suis certaine qu'ils pourraient vous charmer.
William affichait également un sourire forcé, un sourire de façade. Même si vu de l'extérieur la conversation avait tout l'air d'une retrouvaille tranquille, le jeune homme savait que Myrsela lirait sous son masque comme il pouvait deviner son mécontentement de ne pouvoir s'échapper à cette situation.
Il attendit qu'elle se rapproche pour continuer la conversation. Il lui adressait un large sourire, un sourire presque malicieux.
" Très bien je vous remercie. Elle est ravie de sa nouvelle monture. Vous avez fait un excellent travail avec votre famille pour me fournir une telle bête. Je serai curieux de découvrir vos écuries pour voir i vous n'auriez pas d'autres spécimens intéressants. "
Une conversation creuse ou une véritable requête ? Il devinait que la jeune femme n'aurait aucune envie de l'inviter à découvrir son lieu de vie.
De dos par rapport au futur laird, la jeune femme pesta intérieurement, serrant fugacement les points. Elle ne l'aurait pas imaginé réagir ainsi. Tant pis pour elle, c'était un coup simple et efficace. Elle se retourna relativement doucement, avec un sourire de façade aux lèvres. -Sieur Mackinnion. Je me porte bien, merci. Elle se rapprocha donc, cela n'avait aucun sens de rester près de la porte comme un bandit en cavale. -Votre fiancée et vous même allez bien? Elle jouait l'air de rien avec ces gants, comme une authentique demoiselle soucieuse de son apparence face à un puissant. Intérieurement elle pestait contre le monde entier.
Le jeune homme resta de marbre face à la réaction de Myrsela. C'était si étrange de la voir agir ainsi alors qu'ils avaient toujours su tenir leurs masques selon les situations. Will sentait que quelque chose avait changé, en fait il savait, car lui aussi n'était plus tout à fait le même. Il ne pouvait cependant pas la laisser filer ainsi, ce n'était pas comme ça que devait se passer leurs rencontres futures. Il fallait impérativement rétablir l'ordre pour éviter de s'engouffrer plus profondément dans le cratère de néant.
Il s'éclaircit brièvement la voix et lança assez fort pour que l'attention se porte sur eux, et de ce fait piège la jeune femme, qui ne pourrait s'échapper sans attirer tous les regards sur elle.
" Mademoiselle Owen, comme c'est drôle de vous croiser ici. Comment allez vous ? "
William Mackinnion. Elle resta figé un instant, une statue au visage délicat que seul un éclair dans ses yeux animait encore. Mais elle se reprit, car la jeune femme commençait à s'habituer à cette pression permanente. Elle se méfiait constamment désormais. Elle adopta l'attitude de celle qui reste très distante,respectueuse et froide. Elle voulait se protéger. Surtout quand on savait comment s'était achevé leur dernière rencontre: en soit une brillante expérience, dommage quant à la conclusion. "Monseigneur..." prononça-t-elle assez bas avec une rapide et discrète révérence, avant de commencer à tourner les talons.
William avait été envoyé à la ville pour rendre un rapport officiel de son Père destiné à la Garde. Il avait passé une partie de la matinée au bord du port, à discuter avec les généraux en charge, qui rappelons le, étaient sûrement impliqués lors de l'incident du navire en feu, dont les coupables étaient toujours en cavale. Le jeune homme avait assuré que si jamais ses informateurs trouvaient des pistes, il se presserait d'en informer les Militaires. Mensonge bien sûr, le malfaiteur se trouvait sous leurs nez, mais qui s'en rendrait compte ?
Si quelqu'un le perçait à jour, William savait qu'il aurait à le tuer. La seule raison pour laquelle Myrsela et lui s'était épargné, était qu'ils vivaient exactement la même expérience d'une double identité qu'on ne peut révéler. Si l'un parlait, l'autre aurait les arguments pour renvoyer la balle dans son camp aussitôt.
Une fois cette tâche faite, le jeune homme se rendit aux boutiques. Il devait chercher un cadeau pour le frère aîné d'Ariane. C'était bientôt son anniversaire et il se devait d'honorer sa fiancée en traitant sa famille avec grand respect. Pour cette raison il s'était aventuré à l'armurerie. Ce n'était pas après plus de cinq minutes là-bas qu'une personne rentra. Et bien sûr il la connaissait ...