L'heure était venue....Il fallait désormais agir.Un long frisson parcourut la peau de la jeune femme; dans une crique un peu à l'écart et sombre, elle ramait à petits coups, face à William. Elle ne conservait que le prénom, pour oublier. Elle ne vouait pas penser aux risques. Son attention était portée sur la sensation d'eau froide sur son corps. Elle avait sa cape, et en dessous, des vêtements très restreints pour pouvoir nager au mieux. C'était aussi bien si son compagnon connaissait son identité, cela lui permettrait de moins s'embarrasser de détails supplémentaires... Elle ramait en silence. Oui, elle avait peur, qui ne n'aurait pas peur... Cette peur pourrait être salutaire. Un peu nerveux, ses doigts la trahissaient. Fins, ils tremblaient légèrement sur le bois des rames. Elle connaissait le plan par coeur. Elle connaissait cet endroit par coeur. Elle connaissait ces hommes....plutôt bien. Tête courbée dans ses pensées, Myrsela finit par lever les yeux sur la silhouette de celui qui l'accompagnait.
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"Adieu William..." Murmura la jeune femme en regardant l'ombre disparaître parmi ses soeurs. Elle secoua à son tour la tête, siffla son fidèle compagnon qui la ramènerait à bon port, sans mauvais jeu de mots. Ainsi s'achevait la première vraie aventure alors. Elle monta tant bien que mal en selle, et partit tranquillement au travers des bois. Le dégrisement était survenu bien vite.
William était tout aussi déconcerté que sa collègue. Elle avait raison, personne n'avait besoin d'être au courant pour cette soirée. Ariane le croyait bien sagement installé dans une chambre d'auberge au centre ville d'Édimbourg, tout comme le reste de sa famille. Il n'y avait que Myrsela qui savait que lui, William Mackinnion, se baladait sur une plage en bordure du port de la ville à des heures si tardives de la nuit. Il secoua alors la tête tâchant de se reprendre.
" Vous avez raison. Nous ne devrions pas trainer. Les autres auront terminé et la Garde sera bientôt sur les traces de ceux qui se sont invités à la fête sur le bateau marchand. "
Il se dirigea vers le bosquet où il était prévu qu'ils disparaissent sans traces. Le jeune homme se retourna vers la demoiselle Owen.
" Prenez soin de vous ! "
Lança-t-il avant de disparaitre dans la pénombre.
Un peu perdue dans le flou et la trahison de sa raison, la jeune femme tourna le dos à son camarade et se massa le crâne: -Bien sûr. C'était une des réponses les moins appropriées ou les plus banales, qui sait, mais elle ne réalisait pas vraiment dans son état. -Oublions ça, d'accord? De toute façon, de vous à moi, cette soirée ne sera jamais connue de personne, nul n'aura besoin de se souvenir d'un tel moment. Mais la boule au ventre restait bien présente, et un terrible mal-être continuait à envahir son esprit, en dépit de l'euphorie de l'alcool ...fort calmée par cet instant. Déçue? Evidemment que non! Et pourtant rien n'allait. -On devrait...hum, bah...Se séparer.
Myrsela Owen avait bu, assez pour que ses réactions soient imprévisibles pour le jeune homme. Il l'avait laissé l'approcher, poser sa main sur sa joue rugueuse à cause du duvet de barbe qui poussait. Peu méfiant, le garçon avait trop de respect pour sa camarade pour croire qu'elle tenterait de le séduire. William était un grand naïf, un grand rêveur. Il aurait dû se méfier d'avantage lorsqu'il avait capté son sourire, lorsque les doigts avaient touché ses lèvres. Quel idiot.
Le baiser ne suscita qu'une réaction de surprise chez lui. Pris de court, il regarda la jeune avec des grands yeux ronds. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Il ne pouvait pas faire ça. Pas à Ariane. Sa pauvre fiancée ne méritait pas qu'il batifole avec une autre pendant qu'elle restait bien sagement au Domaine.
La jeune femme paraissait tout aussi déboussolé que lui. Que dire ? Que faire ? William ne trouva qu'à balbutier quelques paroles vaines.
" Myrsela, je m'excuse mais je suis fiancé, je ne peux pas trahir Ariane. "
La réponse ne plut pas vraiment à la jeune femme, dans l’état dans lequel elle se trouvait présentement en tout cas. Cela lui faisait prendre cette réalité pour un rêve, absurde, certes, mais qu’avait à y perdre cette version si superficielle d’elle même ?
Elle approcha du jeune homme. Ses prunelles émeraudes détaillèrent avec une froide ironie le noble :
« Vous ressemblez à Liam.Un peu. »
Ses doigts à peine tremblants effleurèrent la joue de son allié, puis sa lèvre.
« Vaguement. »
murmura-t-elle, un sourire séducteur et un peu perdu aux coins de ses propres lèvres. Et la jeune femme embrassa son acolyte. Longuement, avec une douce passion au goût enivré.
Soudain elle recula, cligna plusieurs fois les yeux, secoua la tête.
« Par tous les saints je... »
Que lui avait-il pris ? Il s’agissait de William, futur laird et mari….Mon dieu. Elle recula, désorientée, et pour une des premières en compagnie d’un inconnu, elle montra un tout autre visage.
Tout comme Myrsela, l'alcool lui réchauffa aussitôt les entrailles. Mais c'était traitre. En vérité il n'avait pas moins froid, son esprit lui faisait simplement croire à une telle chose, lui brouillait ses sens. Contrairement à son acolyte, qui de sa situation de femme, ne devait pas être régulièrement invité à aller boire des breuvages aussi fort. Les femmes étaient rarement les bienvenues dans les tavernes seules, elles se contentaient au rôle d'accompagnatrice et encore.
Il garda un oeil sur elle pendant qu'elle déambulait sur la plage d'un pas incertain. La situation avait un aspect comique. Jamais il n'aurait pensé voir la demoiselle Owen donner un tel spectacle. Lorsqu'elle était la fille du Bourgeois, rien de laissait penser qu'elle était une mercenaire dans l'ombre. Tout comme lui, elle portait avec brio le rôle que la vie lui avait donné. Peut-être était-elle l'une des rares personnes avec qu'il pouvait être vrai ? Et encore, son visage de mercenaire n'était pas totalement un portrait franc de lui même. Will ne laisserait pas sa carapace être percée si facilement.
Myrsela se tourna dans sa direction et lui demanda une question qui le surpris.
" Et bien disons que ma fiancée et moi nous nous entendons bien. Nous sommes occupés à prévoir le mariage bien que nos parents prennent la majorité des décisions. Cela nous laisse le temps d'apprendre à mieux nous connaitre. Je l'avais déjà vu quelques fois, mais jamais nous n'avions eu le temps de discuter réellement. "
Il avait répondu avec pudeur, gardant les détails pour lui.
Myrsela se prit une bonne rasade de l'alcool qui lui brûla la gorge et lui réchauffa les entrailles. Elle se sentit tout à la fois nettement mieux et clairement en train de vaciller. Ses paupières clignèrent d'elles-même et la jeune femme ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux. Comme si une montée de lave avait précipitamment parcouru toutes les veines de son corps.... Elle ne put s'empêcher d'avoir un rire assez amer. -Oui, une bien belle réussite. Elle fit quelques pas plus ou chancelants, mais c'était l'effet voulu. Elle reprit une gorgée, qui n'eut pas le même effet, mais répandit une sorte de brume très légère et vraiment agréable dans son esprit. La jeune femme reprit conscience, sut qu'elle allait déraper, mais elle ne saurait s'en empêcher, n'étant pas accoutumée à l'alcool fort. -Dites-moi, si je puis me permettre, quitte à être tête brûlée jusqu'au bout, comment vous en sortez vous avec votre nouvelle épouse? Suite à sa propre réflexion, elle leva les sourcils: -Pardon, mais cette soirée s'annonce pire que ce que je pensais.Entre nous. Et elle reprit une rasade
Le jeune homme avait attrapé un châle dont il se servit pour éponger l'eau salée de son corps. La mer avait été bien agressive ce soir avec eux, peut-être une vengeance pour l'épave qu'ils laissaient au fond du port d'Édimbourg ? Au loin, le laird devinait les dernières flammes qui consumait le navire. Il n'avait pas pensé détruire le Cog mais Myrsela avait voulu attirer encore plus d'attention sur eux. C'était risqué, peut-être que la Garde serait amené à enquêter si le propriétaire du navire voulait trouver des coupables. Quelles preuves de leur passage resterait-il une fois que le Cog aurait sombré au fond de l'eau ?
Il s'habilla avec une chemise en coton épaisse, et se détourna temporairement de la demoiselle pour enfiler un pantalon qui ne lui collait pas à la peau tout en dégoulinant de l'eau. Il avait besoin de retrouver un peu de chaleur et puisqu'il leur était impossible d'allumer un feu pour éviter d'attirer l'attention sur eux, Will devrait se contenter de vêtements bien chaud.
La demoiselle Owen avait retrouvé son fidèle destrier, et de son côté, Will reprenait toujours sa respiration sur la plage. Il entendit les pas de la jeune femme criser dans le sable tandis qu'elle s'aventurait vers lui cependant il ne s'attendait pas à la suite.
Une gourde en cuir atterrit à ses pieds, telle une récompense à leur sauvageonnerie. Le garçon releva un regard curieux sur la demoiselle avant de sourire, ils n'avaient pas démérité.
" Merci bien. Á la probable réussite de notre mission ! "
Déclara-t-il en imitant sa camarade avant de boire.
Ils avaient bien le droit de faire une pause agréable suite à tout ça.
"Comme vous pouvez le constater, moi aussi..." Dit-elle avec un sourire qui découvrit son émail aux couleurs de l'ivoire. Assise sur le sable détrempé de sel, la jeune femme posa la tête sur ses genoux, pensive et heureuse. Elle se sentait étrangement bien... Le déballage du laird la fit sourire, encore; attrapant au hasard elle entreprit de se sécher et de mieux faire circuler le sang dans ses jambes et ses bras transis. Et , ceci se faisant, elle émit un long sifflement modulé d'une façon bien spéciale: un craquement se produisit, à la lisière de la forêt, non loin. Un autre bruit...Un soufflement, un trot... "Mon vieil ami..." murmura-t-elle en posant sa main sur le chanfrein grisonnant de sa fidèle monture. Elle se leva en s'appuyant avec plaisir sur lui, et alla fouiller dans les sacoches derrière la selle.... Ressortant un lourd et confortable manteau, elle se le mit sur les épaules, et dégaina une chose autrement essentielle... Deux belles gourdes en cuir. Elle en jeta une à William: "Réflexe!" Elle déboucha la sienne, huma. Elle avait entendu son père dire qu'il s'agissait d'un des meilleurs whisky...Tant mieux, s'il savait qu'elle en avait volé une bouteille, cette dégustation vaudrait sans doute mille réprimande! Avec un léger sourire aux coins des lèvres, Myrsela leva la gourde "A la probable réussite de la mission"
Le courant était fort. Bien plus fort qu'anticipé. Williamn grimaça. Il peinait à avancer, aussi décida-t-il qu'il était plus intelligent de préserver sa force en se laissant emporter par les vagues quelques instant. C'était une pause nécessaire pour qu'il reprenne ses esprits. Le froid, les cris provenant du port, tout ça le détournait de son objectif principal. Il devait se concentrer. Lorsqu'il fut certain d'être prêt à reprendre ses efforts, il se lança dans un crawl puissant. Ses muscles se bandant à chaque mouvement. Il fendait l'eau en se dirigeant vers la plage.
Le courant changea, et il ne tarda pas à retrouver sa partenaire de mission sur la petite plage où ils avaient prévu de débarquer. Les jeunes gens n'arrivèrent pas pile à l'endroit prévu, le courant les avaient détourné de leur objectif légèrement et ils avaient atterri plus au sud. Mais cela n'était point grave, le tout était qu'ils ne se soient pas noyés dans les embruns.
William s'allongea sur le sable. Ses poumons brûlaient. Il regarda les étoiles, voilées par quelques nuages. Le ciel était toujours magnifique de nuit. L'astrologie lui plaisait tout autant que la biologie, et c'était un sujet passionnant. Il contempla l'étendue immense tandis qu'il forçait pour prendre des inspirations malgré la douleur. Le jeune homme n'avait pas encore trouvé la force de prendre des nouvelles de sa camarade. Puisqu'elle était sur la grève avec lui, Will se doutait que globalement elle allait bien. Et prenant la parole la première, William devina qu'elle était en bonne santé.
" J'ai connu meilleur jour, mais je suis vivant et en un seul morceau, et vous ? "
Demanda-t-il sans pour autant la regarder puisqu'il savait qu'elle n'était pas beaucoup habillé.
Il finit par se redresser, son regard sur la mer à présent tourmentée. Il rigola. Il était vivant. Il avait réussi. Et les autres devaient s'en être mis plein les poches grâce à leur diversion. William se releva lentement et commença à marcher en direction d'un petit bosquet d'arbres plus au nord. Il disparut un instant avant de revenir vers sa camarade en tenant une sacoche bien rempli. Il la vida sur la plage à ses pieds. Á l'intérieur se trouvait plusieurs pans de tissu sec, et des vêtements. De quoi se sécher et se rhabiller en étant bien au sec.
" J'ai pensé que nous pourrions en avoir besoin. "
Cette baignade était plus une épreuve qu'un loisir. Elle était certes habituée au carcan de froid constant des rivières chantantes, mais dans une atmosphère éthérée d'été,et non durant une nuit qui glaçait jusqu'aux os. Elle continua à nager...Il ne fallait pas s'arrêter, à aucun moment...Elle sentait que lentement ses mains et ses pieds devenaient insensibles, mais qu'importe... Myrsela poursuivit sa trajectoire, bien qu'elle eut l'impression de plus s'éloigner du bord qu'autre chose... Une crampe vint insidieusement tétaniser les muscles de sa jambe: en grimaçant, la jeune femme se rendit compte qu'il fallait atteindre au plus vite la plage... Encore un effort. Elle plongea. Et par chance, le courant semblait enfin en leur faveur. Les premiers rochers dont elle put s'aider pour parvenir au rebord, et enfin le sable. Ils étaient hors de portée, et avec de la chance les hommes du Port ne les avaient pas remarqué. La jeune femme se hissa vaguement sur la grève, avant de se laisser retomber sur le dos, un sourire aux lèvres: juste un moment de pause. Cela faisait du bien. Fatiguée, mais satisfaite. Et gênée, d'un coup aussi. Elle se redressa, sortant sa cape, qu'elle remit aussitôt, avec un frisson. Vêtement mouillé, comment attraper bêtement une bonne vieille maladie. Etonnament, elle était fort amusée par la situation. Jamais elle n'avait rien osé de tel. Mener une vie qui était hors des convenances était déjà une étape, savoir se battre, vivre comme elle le voulait dans cet autre univers de la nuit...Mais ce soir marquait quelque chose de nouveau: elle avait mené une action d'envergure, en compagnie d'un homme qui n'avait à aucun moment de réticence à ce qu'elle soit de pair avec lui. Sentiment d'euphorie... En même temps, il fallait qu'elle fasse toujours attention. Rester toujours sur ses gardes, c'était sa première règle. Elle leva les yeux sur William. "Tout va bien?" Demanda-t-elle en resserrant le tissu contre elle. Peu importe ce qu'il avait vu, c'était le moment de savoir si c'était un gentleman.
William se jeta à l'eau à l'invitation de sa camarade. Il était prêt à sentir la morsure du froid sur sa peau, il ne s'attendait pas à une baignade de plaisance, cependant le choc de température fut plus violent qu'attendu. Un frison violent lui remonta le long de la colonne vertébrale et il se hâta de commencer à nager en direction de la berge pour se sortir de là.
Bien sûr, il jetait de temps en temps un regard en arrière pour s'assurer que Myrsela suivait, elle aussi avait dû subir la même morsure glaciale. Il nageait aussi vite que possible. Derrière lui, il entendait le cri des hommes qui approchaient dans le navire pour aller porter secours à ce bateau en feu. Ils se débattraient un temps contre les flammes avant de se rendre compte que personne n'était à bord, la carcasse désertée finirait par sombrer jusqu'à ce qu'on vienne nettoyer les décombres le lendemain à la lumière du jour.
Heureusement pour eux, la mer était relativement calme ce soir. Les vagues étaient de taille très modérée, en revanche le courant se faisait sentir. Chaque mouvement était une lutte contre des forces naturelles qui les dépassaient. Ils devaient éviter de s'épuiser. S'ils perdaient toutes leurs forces, jamais ils ne rejoindraient la terre ferme.
La corne...Elle tressaillit, à peine, mais tout de même. Le jeune laird s'animait, l'heure de l'action était venue. Myrsela marqua un temps d'hésitation: elle enveloppa tout le bâtiment ... Attirer l'attention, c'était déjà bien, mais il fallait mobiliser tous les hommes de Port Royal susceptible de poser problème au reste de la troupe. Elle pesa le pour et le contre, et prit sa décision. Tant pis. D'une main qui se voulait ferme, elle attrapa un flambeau, et fit en sorte que la flamme commence à ronger lentement la voile....Parfait.Ce serait un spectacle impressionnant, les autres ne tarderaient pas à venir éteindre cet incendie naissant, et les dégâts seraient minimes. Ceci fait, elle se tourna d'un quart vers William: "Prête.Après vous!'' dit-elle avec un sourire amusé cette fois. Elle sortit un petit sac en toile du dessous de sa cape, ôta la cape elle-même. La jeune femme était habillée...très très légèrement. Une bande de tissu couvrait sa poitrine, et une jupe assez courte masquait ses hanches. Pour ne pas trop s'attarder, à ce stade de la mission et de l'indécence, elle s'élança, et plongea. Finalement, c'était un avantage que cet homme sache qu'elle était une femme, cela lui simplifiait les choses. Elle se mit à nager, avec énergie...D'habitude Myrsela nageait dans les rivières, avec des courants plus ou moins importants.Elle jeta un bref regard pour observer le bateau qui brillait au milieu de port, puis sur son compagnon.
William laissa donc les commandes à Myrsela qui se débrouillait prodigieusement bien pour la situation. Il fit le tour du navire allumant chacune des bougies qui se trouvaient sur le pont. Á présent le bateau était en vu. Celui qui louperait le Cog à l'entrée du Port ne pourrait qu'être aveugle. Avant même qu'il ne se tourne vers sa comparse, la corne de brume du Fort de la Marine Royale sonna, leur indiquant qu'ils avaient été repéré. C'était bien sûr ce qu'ils souhaitaient. Ils devaient attirer tous les regards.
Le jeune homme revint sur le pont en courant.
" Prête pour le plongeon ? "
Demanda-t-il en rassemblant tous ses biens dans la sacoche qu'il avait emporté.
Il ferma bien la boucle en fer pour être sûr de ne rien perdre dans la mer.
Ils avaient encore un peu de temps avant que la Garde n'arrive sur le navire, mais le plus vite ils se jettaient à l'eau, le moins de chance ils auraient d'être repêché. William se dirigea vers l'arrière du navire, il y avait une corde attachée à la proue qui leur permettraient de descendre sans devoir se jeter à l'eau.
Elle s'attarda à remarquer la silhouette du jeune homme. C'était amusant, on aurait dit un dieu celte, fort sur le pont, illuminé d'une flamme de vaillance...Son imagination s'autorisa ce divertissement, et elle eut un vrai sourire amusé. En même temps, le futur laird incarnait une forme oubliée de personnage...Etrange. "Non, je sais gré de cette proposition. Il va falloir qu'on déploie la maximum maintenant." Et elle tenta de manoeuvrer le navire pour le faire entrer par la voie principale, bien en vue. Ils étaient très bien situés...Parfait.. Son regard passait du rivage qu'elle notait à une distance honorable...Cela demanderait i, effort, certes, mais elle s'était préparée. Le navire était presqu'immobilisé. Elle repéra leurs comparses....
"Maintenant..."
Le laird opina d'un mouvement de tête, si tout se passait bien de son côté, il continuerait à s'affairer du sien. Il avait bientôt terminé avec la voile quand Myrsela lui demanda de ralentir le navire d'avantage. Le Cog allait à une vitesse de croisière mais ce n'était pas encore suffisant. Il accentua ses efforts jusqu'à obtenir une vitesse raisonnable, vérifiant avec sa camarade de mission que cela était à présent convenable.
Lorsque le rythme était enfin bon, le jeune homme revint vers la barre, il n'était pas prêt à reprendre le navire pour l'instant. Il se pencha sur son sac en cuir pour en sortir un briquet. Ce ne serait pas une tâche aisée de rallumer les lanternes qui avaient été éteintes pour quitter le port de plaisance en toute discrétion, mais c'était à présent nécessaire pour que la distraction soit suffisante pour attirer l'attention de tous sur l'embarcation.
Le jeune homme se pencha sur la question, bientôt une étincelle naissait sur une lanterne, il faudrait faire le tour du navire pour allumer le reste.
" Souhaitez vous que je reprenne la barre ? "
Demanda-t-il à sa collègue qui tenait parfaitement le Cog en direction du port.
La torche dans sa main brillait dans la nuit comme une étoile resplendissante.
"Très bien je vous remercie." Lui répliqua-t-elle, en esquissant un sourire. Elle vint d'un pas qui se voulait détendu saisir la barre. Il fallait réduire, mais la jeune femme avait pertinemment remarqué qu'il était organisé et savait prendre des décisions à la hâte si besoin était...Pourquoi être surprise? N'était-il pas destiné à cela? Elle songeait avec lassitude à cela.Puis elle se reprit. Ca ne servait à rien de penser à cela, et sûrement cet homme voulait fuir ce carcan mille fois pire que le sien...Quoique...Cage dorée,mais toujours une cage. Avait-il tant soif de liberté ou cachait-il un projet plus...fourbe? Plus divers? Elle devait rester attentive. Tenant la barre,elle s'exprima relativement bas pour ne plus se faire repérer, car la proximité devenait plus risquée désormais. "Baissez la voilure, s'il vous plaît...nous allons trop vite pour rester dans notre distance idéale..."
Comme son acolyte venait de le soulever le port était enfin en vu. Il n'était pas trop tôt, ils arriveraient juste à temps pour que les autres puissent mener leur assaut sans se faire remarquer. Le jeune homme invita Myrsela à tenir la barre tandis qu'il s'occupait de faire ralentir le navire. Il ne fallait pas qu'on les surprenne trop tôt. Le tout était de se faufilait au plus près des quais pour que cela crée une diversion.
Will s'attela sur les voiles pour ralentir l'embarcation. Il n'avait rien dit à sa camarade bien qu'il ait perçu son inquiétude. Elle ne devait pas aimer la mer ou les navires, pourtant elle s'était portée volontaire pour cette partie de la mission. Quoique ... il n'avait pas précisé qu'il faudrait prendre la mer lorsqu'elle avait dit oui, c'était seulement après qu'il avait précisé son idée. Il était alors trop tard pour se retirer, et il savait que par fierté, la jeune femme ne l'aurait pas fait. Elle avait une étincelle de défi dans les yeux comme si elle voulait plus de la vie, de sa situation. Elle se battait toujours. Il l'avait su dès leur première escapade à deux, lorsqu'il fuyait la Garde.
" Tout va bien ? "
Demanda-t-il à demoiselle pour s'assurer qu'elle n'avait pas besoin d'aide tandis qu'il s'occupait du reste du navire.
Ils voguaient donc sur cette mer qui paraissait tant hostile à la jeune femme...Elle détestait ça.Heureusement que la côte était visible...Les lumières de la terre. Vraiment, elle préférait cent fois rester sur la terre ferme. Ce sentiment de méfiance qui demeurait en elle était accentuée sur ce bateau...Elle n'avait pas de soutien. Bref, plus vite ce sera fini, mieux ce sera. ''Nous y sommes enfin...'' murmura-t-elle presque sans pouvoir se retenir. Elle se mordit la lèvre, irrité d'avoir montré une nervosité qu'elle ne contrôlait pas comme à l'accoutumée, et en plus avec une remarque ridicule et inutile. En effet, voilà que la silhouette massive du port approchait. Cela signifiait la fin d'une angoisse et le commencement de l'action, enfin. Mettre le cerveau en pause, et faire parfaitement ce qu'on a convenu. Elle jeta un coup d'oeil à son compagnon.
Le jeune hériter Mackinnion tenait la barre fermement, il naviguait droit vers le port d'Édimbourg s'il ne se trompait pas dans les directions. Myrsela revint vite vers lui avec la boussole, elle la lui tendit mais il préféra garder les mains sur la barre le temps qu'une vague plus haute que les autres ne frappe le navire. Il la remercia poliment avant de saisir l'outil et de jeter un œil à la petite flèche. Il corrigea aussitôt sa direction. Rien de grave, jusque quelques nœuds de déviation. Ils ne perdraient que quelques minutes tout au plus.
Le mercenaire sentait le vent sur son visage. La brise marine qu'il affectionnait. Il aurait aimé tout abandonner pour partir à l'aventure, découvrir des terres inconnues comme tant d'autres l'avaient fait ces dernières années. L'Inde, l'Amérique, la Chine ! Il n'avait lu que des atlas mais rien ne serait jamais comparable à l'expérience. Cependant il était fiancé à présent, dès qu'il serait marié on attendrait de lui un descendant.
Le voyage se passa en silence, ils n’étaient pas de grands bavards. Will évitait de la questionner et il n'avait pas vraiment de sujet à aborder. La mission était ce dont ils auraient pu parler mais l'un comme l'autre savait très bien à quoi s'attendre alors à quoi bon papoter.